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De la
Mine au Musée
Situation et minéralogie
La commune de Saint-Martin est très riche en gîtes miniers :
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Au-dessus de l’ancien village de Praz-Jean,
dans les parois abruptes qui surplombent la Borgne, on y trouve les
gisements de « Comtesse » et « Forêt Noire » (altitude 1280m-1520m). A
400m au sud-est de Comtesse, à l’altitude de 1500m environ, se situe le
gîte de « Maison-Vieille ».
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Sur la rive droite de la Borgne, à
l’altitude de 1330m se situe le gîte de « Barma » : cinq galeries reliées
entre elles par des descenderies ont été forées.
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Sous la route qui mène à Ossona,
en-dessous du chalet de Crétalet, se situe un gîte de cuivre (la teneur
moyenne des schistes imprégnés est de 4%).
Tous ces gîtes miniers sont situés dans
les schistes de Casana du Val d’Hérens : ceux-ci prennent leur nom du
Casanapass dans la Haute Engadine. Ils comprennent des schistes talqueux,
cloriteux, argileux et de formation gneissique.
Le gisement de Praz-Jean (mine Comtesse) est constitué par deux
filons-couches de quartz contenant essentiellement de la blende et de la
galène. La galène est fortement argentifère et peut contenir jusqu’à 4kg
d’argent par tonne de plomb. Les filons n’atteignent jamais de grandes
dimensions, en général 10 à 15cm.
La minéralogie du site de Barma est pratiquement identique à celle de
Comtesse, c’est la continuation d’un même filon, que les siècles d’érosion
qui ont transformé le Val d’Hérens actuel ont coupé en deux.
Période d’exploitation et compagnies
minières
Les gîtes miniers de notre commune ont
été exploités d’une manière très sporadique. C’est vers 1850 que date la
première période d’exploitation. Les gîtes miniers de Barma, de Comtesse, de
Forêt Noire et de Maison-Vieille sont exploités entre 1850 et 1859 par la
Concession de Minerai de Plomb de Praz-Jean.
Les travaux sont repris entre 1895 et 1900 par une société belge. La
compagnie Centrale d’Exploitation et Recherches Minières, compagnie
française, reprend les travaux au printemps 1913 dans les mines de Comtesse
et de Barma. L’activité est suspendue avec l’éclatement de la première
guerre mondiale en août 1914, puis reprise de manière discontinue jusqu’en
1925.
La dernière période d’exploitation réalisée par la SA des Mines de Comtesse
sous les ordres du Bureau Fédéral des Mines entre 1939 et 1943 concerne
uniquement les sites de Comtesse et Comtesse supérieure. La fermeture de la
mine en 1943 est due au fait que l’exportation de la production n’a pas été
autorisée.
Installations et travail des mineurs
Du début de l’exploitation à l’année
1925, tous les travaux sont exécutés à la main. Le minage se fait au marteau
de mineur et au burin court. Le transport du minerai jusqu’à la station
principale du téléphérique se fait à dos d’homme. Les minerais sont
descendus de la mine par un câble jusqu’à Praz-Jean, où ils sont concassés à
la main et triés sur des cribles. Durant la dernière période d’exploitation,
les minerais sont chargés sur des wagonnets à l’intérieur de la mine et
transportés sur rail jusqu’à la station du téléphérique.
La vie du mineur est rude. Les protections élémentaires n’existent pas.
Aucune ventilation, pas de casque, pas de masque, pas de lunette. Mais le
mineur sait qu’il fait grincer et souffrir la pierre. Peut-être attache-t-il
son cœur tumultueux à ce dur ouvrage d’homme. Le mineur est attaché à la
roche, il la pénètre et la brise, la conscience de son adresse et de sa
puissance naît dans son âme. La pioche et le burin révèlent peut-être à ceux
qui attaquent la roche des secrets aussi profonds que la montagne. La
passion du métier et la fatalité ont parfois aussi engendré la tristesse,
Sainte Barbe, patronne des mineurs, n’a pas toujours pu les protéger.
Du temps passé au Musée
Les gîtes du Val d’Hérens, comme c’est
le cas pour la plupart des gîtes métallifères de la région alpine suisse,
autrefois exploités sont aujourd’hui abandonnés. Très difficiles à
exploiter, compliqués au point de vue de la genèse, ce sont plutôt des
problèmes de géologie que des sources de revenu. Un jour, la mine a été
fermée, la montagne, la forêt ont retrouvé la sérénité. Il ne reste
aujourd’hui sur le site de Comtesse que des fers tordus, rouillés, image
d’une certaine désolation. Mais le travail irremplaçable de ses mineurs
parle encore aujourd’hui à notre imaginaire. On dit que le travail du
présent tisse la vie de l’avenir et que notre devoir d’humains est d’agir
non seulement pour notre bien mais aussi pour celui de nos descendants.
Passionné par les travaux souterrains, j’ai eu un énorme plaisir à diriger
de grands chantiers de recherches minières. Je n’en citerai que deux :
1974-1976, l’exploration du gisement de fluorine de la Crettaz à Mont
Chemin et 1977-1978, l’exploration d’uranium aux Marécottes. Avec mon
équipe de Bedjuis, j’ai vécu de magnifiques expériences et me suis
senti proche du mineur au front d’attaque.
La sagesse populaire affirme qu’avant de savoir où l’on va, il est bon de
savoir d’où l’on vient. J’ai collectionné des outils utilisés il y a 100 ans
et plus pour les rassembler aujourd’hui dans l’ancienne station de départ du
téléphérique de la mine de Comtesse, qu’avec des amis, j’ai transformée en
un petit musée de la mine, à la mémoire d’une race d’homme en voie de
disparition. Mais aussi mettre en valeur le patrimoine d’un temps passé et
le transmettre aux générations futures.
Roland Moix |
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